La symbolique du petit prince

Recherche intellectuelle de Serge Doussal (11 avril 2000)

En relisant le petit prince, trop adulte, j’avais oublié mon âme d’enfant, je l’ai

abordé bien sur un peu intello certain que la maturité ouvrait bien des portes

et je suis passé à côté de beaucoup de choses.

J’ai même cru que c’était un conte pour parents ! ! ! La réponse était pourtant

dans le texte, c’était le petit personnage blond qui m’a remis sur la voie en me disant

« les grandes personnes ne comprendraient que cela ait autant d’importance »

Pourtant cet ouvrage est tout de même un voyage initiatique, à chacun de l’appréhender à sa façon.

On peut par exemple laisser parler l’imaginaire sans réflexion ni analyse, en entrant

dans la peau des personnages, vivre les situations en cheminant au gré des chapitres

Ce mode d’approche malgré tout, nous interpellera et amènera commentaires et questions

La voie choisie aujourd’hui est celle du symbolisme, bien sur à partir du moment

qu’il y a recherche dans un texte, le chemin emprunté est forcément un peu intello

mais en laissant aller son cœur tout en nourrissant l’intellect, en raisonnant sans

être trop raisonnable ou trop adulte, le parcours peu être ensoleillé.

La Bible ne dit- elle pas « le royaume des cieux, donc la lumière, sera ouvert à celui redevenu pareil

à l’enfant

QUI EST LE PETIT PRINCE ?

C’est le moi intérieur qui se révèle lors de la remise en question ;

C’est l’homme profond qui apparaît au moment de la crise, c’est l’auteur, c’est nous

même. Tout ce petit roman est un chemin initiatique qui commence par un état de

crise : la panne dans le désert, et finit par la réparation de l’avion, masquant une

réparation plus importante, celle de l’homme.

l’avion en détresse se pose dans le désert. Voilà deux mots clés :

DETRESSE et DESERT

Nous avons tous vécu des périodes difficiles, douloureuses et de doute, n’est-ce

pas dans ces moments que les remises en questions arrivent ?

Ici le désert est un lieu privilégié pour la prise de conscience. C’est un lieu

d’isolement, de mort où la plupart des acquis sont inutiles où les certitudes n’existent

plus. C’est un lieu de passage, de recherche de l’essentiel où l’on doit redécouvrir son

intériorité pour dépasser ses limites morales et physiques.

On retrouve le désert dans la plupart des textes sacrés.

La transformation dans ce lieu de lutte pour la survie demande des efforts, des

combats avec soi-même, un besoin d’avancer ne serait-ce que pour boire.

BOIRE

Mais de quelle eau parle le petit prince lorsqu’il dit «j’ai soif de cette eau là » ?

Cette eau ne provient pas d’un puits saharien alors que nous nous trouvons en plein

désert, mais d’un puits de village bien de chez nous, avec margelle, poulie, seau et

corde.

Ce puits est un lieu de vie, la corde relie l’eau contenue au profond de la terre mère

à l’homme, elle est comme un cordon ombilical.

L’arrivée de l’eau se fait montante, la base nourrissant la conscience.

Cette eau là est autre chose qu’un désaltérant car elle est née de la marche sous les étoiles,

du chant de la poulie, de l’effort des bras, elle est bonne pour le cœur.

C’est dans l’eau du puits de chacun qu’est dissimulée la vérité, à nous de la puiser nue et pure.

Le voyage du petit prince de planète en planète est un regard de ST EX sur lui

même, c’est aussi notre portrait dans un miroir.

Nous retrouvons sur chaque planète visitée une tendance de notre égo.

Commençons par sa celle du petit prince, qu’il partage avec un personnage

clé « LA ROSE », mais ceci est une autre histoire.

Chaque matin après sa toilette corporelle le petit prince nettoie sa planète car il y

Pousse des baobabs. Leurs graines sont invisibles, elles croissent timidement, on croit

voir des pousses de rosiers et si l’on n’y prend garde, elles envahissent tout et devenus

baobabs, font éclater la planète. Il faut une discipline quotidienne même si cela est

facile et ennuyeux. Cela s’appelle l’examen de conscience ou peut-être vigilance.

Je vous laisse trouver quelques noms de baobabs, il en pousse au hasard du monde et

des générations.

Le petit prince quitte sa planète, car malgré toute sa bonne volonté, tout son amour

il a douté de sa rose. « J’étais trop jeune pour savoir l’aimer » Dira-t–il ;

La première planète visitée est celle d’un ROI .

Nous y trouvons l’archétype d’un souverain couvrant l’astéroïde 325 de sa noblesse

et son manteau, l’ensemble n’écrasant que lui-même. Il ne parle que pour ordonner,

et n’a pourtant aucun sujet. IL compense son manque d’amour par un despotisme,

et une illusion.

Voilà une mauvaise tendance de notre égo :le besoin d’apparats de titres pour se sentir

au-dessus des autres, croire que l’on domine, que l’on commande……… Cela se voit tous les jours et partout, à tous les niveaux.

La deuxième est habitée par un VANITEUX qui n’existe qu’en fonction des

Flatteries, des louanges de ses congénères.

Il ne sait écouter que si les paroles prononcées le valorisent, il est en quête permanente

de séduction , le monde s’arrête à lui. Autre tendance de notre ego, valoriser la façade

et oublier de travailler son intériorité.

Ne s’aimer que dans l’éblouissement c’est se mal voir, or pour aimer et être aimé il

faut déjà s’apprécier à sa juste valeur.

La troisième est occupée par un BUVEUR qui fuit l’humanité se cachant dans le contenu de son verre

Il boit pour oublier, pour oublier qu’il boit , il a même oublié pourquoi il a commencé

à boire. Bien sur dans son délire il est le plus malheureux du monde alors il boit .

C’est un aveugle volontaire sur lui-même, sur le monde et l’amour.

La quatrième est celle du BUSISNESSMAN associal et solitaire, il compense sa

pauvreté intérieure, son manque d’amour par la possession et l’orgueil

Il se sent même supérieur au roi en disant « les rois règnent mais ne possèdent pas »

Il est un homme sérieux et cela le fait se gonfler …

Deux autres travers de notre égo ! ! ! ! ! ! LA POSSESSION ET L’ORGUEUIL

Sur la cinquième le petit prince rencontrera un ALLUMEUR de réverbères qui

paraît moins traumatisé que les précédents personnages visités. Il fait quelque chose

d’utile puisque allumer c’est joli…… Mais les conditions et l’environnement

de son travail ayant changé, celui-ci n’a plus de sens, il continue d’appliquer la

consigne et n’a confiance qu’en la consigne :le voilà dévoilé, c’est un sclérosé qui se

veut indispensable, mais qui se cachera derrière la consigne, le règlement , le devoir

même si il sert une cause négative .

Combien d’hommes sont devenus des bourreaux au nom du devoir et de l’obéissance ?

La sixième est la résidence du GEOGRAPHE, comme tous les autres il est solitaire

Le travail de ce personnage sans explorateur est inutile, contrairement à l’allumeur

de réverbère, prisonnier du passé, le géographe enferme son inutilité dans l’avenir .

Il pratique la fuite en avant par peur du présent et de son vide personnel.

Peut être fera t’il un jour quelque chose de bien .

Nous remarquerons que ces personnages ont des points communs :

le manque d’amour à donner et à recevoir alliés à la solitude, donc une existence

sans sens profond, compensée par un mal être et des obsessions.

La première partie du voyage du petit prince est effectuée en six étapes rappelant

les six jours de la création selon la bible .

La septième planète visitée est la terre, elle est plantée de milliers de baobabs,

on y trouve des centaines de rois, des millions de buveurs , d’allumeurs de réverbères

d’hommes d’affaires importants, de géographes et des milliards d’adultes .

Par chance l’atterrissage se fait dans le désert ou le petit prince rencontrera

plusieurs personnages qui l’aideront dans sa quête.

LE PILOTE

Le pilote est l’homme enveloppe, il est en mutation, en recherche, le petit prince est

la conscience profonde l’être véritable, tous les deux ne font qu’un, mais avant la

réunification , il faut les réponses, l’ami, l’amour .

Si la réparation est la remise en ordre du moteur , le voyage du petit prince est la

remise en ordre de l’âme du cœur et des idées du pilote.

Le besoin d’un ami est intense pour les deux personnages .Le petit prince demande

au pilote de lui dessiner un mouton , mais la démarche est mal orientée, il veut

l’animal conforme à son désir et de plus le posséder .Revoilà les mauvaises tendances

de notre égo, aimer n’est pas rechercher que ce qui correspond totalement à nos aspirations, aimer n’est pas posséder.

Les hommes n’ont plus d’amis puisqu’il n’y a pas de marchands d’amis .

Comprenant son erreur le petit prince reprendra sa marche dans le désert , il y

rencontrera l’écho, miroir du son qui renvoie ses cris, les cris de son pire ennemi .

Sa route croisera deux personnages très importants le renard et le serpent .

Dans notre littérature à tendance chrétienne ces deux animaux sont néfastes,

fourbes et diaboliques, dans ce texte ils sont positifs

LE RENARD

Le renard est ici le guide, il met l’enfant sur la voie lui demandant de

l’apprivoiser , puis dit « on est responsable des gens que l’on apprivoise » .

Attention ici « responsable » ne doit pas être pris dans le sens de diriger ou superviser

et apprivoiser ne veux pas dire posséder : le renard veut dire mettre en harmonie

avec l’autre , lui donner de soi et de son temps, il ajoutera « c’est le temps que tu as

perdu pour ta rose qui fait ta rose si importante » et ajoutera pour revenir sur

l’erreur du choix d’un ami selon des critères définis « l’essentiel est invisible pour les

yeux, on ne voit bien qu’avec le cœur ». Et « si tu m’apprivoises nous aurons besoin l’un

de l’autre ,tu seras pour moi unique au monde et je serai pour toi unique au monde »

LE SERPENT

Le serpent, l’animal le plus horizontal de la chrétienté , la conscience du monde

d’en bas , de l’extériorisation est ici bénéfique : c’est ANUBIS celui qui dans le

désert fait passer dans l’autre monde .

ll est jaune , couleur de lumière ,d’abord horizontal il se redresse réorientant la

guidant la pensée , il ne fait pas mourir le pilote pour qu’il renaisse , ce n’est pas

nécessaire , il affine sa réflexion et ouvre la porte de son temple intérieur (l’enfant)

Le renard et le serpent font comprendre au petit prince que l’on va souvent chercher

loin ce que l’on a sous les yeux, que l’on prend des mots sans importances très au

sérieux par manque de savoir écouter, par manque de patience, par manque de

savoir aimer .

Le petit prince a quitté sa rose qui n’était pas conforme à ses aspirations , il à vu

100 000 autres roses , il sait maintenant que c’est la sienne , avec ses qualités et ses

défauts est la plus importante .

Le petit prince sera mordu par le serpent il retournera sur sa planète , l’avion sera

réparé et le pilote partira vers une autre vie .

Chacun n’oubliera jamais cette rencontre , chacun sera enrichi accompagné d’un

souvenir fort d’une amitié d’une fraternité, qui sont en soi des actes d’amour.

Chacun saura que l’homme est humain et n’existe vraiment que par rapport à

ce qu’il fait pour les autres . (instinct grégaire)

Si le besoin d’isolement pour se retrouver est parfois nécessaire , la solitude et

surtout la solitude intérieure sont les pires scléroses.

Je conclurai ce travail par deux citations de ST EXUPERY :

« Ce qui embellit le désert c’est que quelque part un puits y est caché ».

« Dans le désert au crépuscule, on s ‘assoit sur une dune, on ne voit rien, on n’ entend

rien et cependant quelque chose rayonne en vous ».